samedi 21 janvier 2012

dimanche 15 janvier 2012

Conduite intérieure

Je suis passé entre les gouttes de pluie acide
J'ai encore tous mes cheveux
La forêt n'avait plus d'arbres
Ils ne savent pas courir comme moi
Je suis arrivé au bord de l'autoroute
Sous les lumières oranges
J'ai longtemps marché en faisant du stop
Mais aucune des voitures qui ne passaient pas par là
Ne s'est arrêtée
Alors j'ai recommencé à courir
Parce que bientôt
Il ferait jour
Et je ne voulais pas voir ça
Je ne voulais pas voir ça
J'ai pris la bonne sortie
Et les premières maisons se sont dressées devant moi
Les lumières en étaient éteintes
Et tout le monde faisait semblant de dormir
Ou ils jouaient à colin-maillard
Ou ils étaient morts
Quelle idée stupide
Les morts n'éteignent pas les lumières
Je courais toujours en arrivant au carrefour
Le feu était rouge mais j'étais trop pressé
A cette heure-là, il n'y a pas de flics
Je traversai le boulevard
De l'autre côté commençait l'avenue des Prés fleuris
Je m'arrêtai au n° 78
J'étais chez moi
Les enfants m'attendaient dans leurs chaises roulantes
Isabelle n'était pas là
Sans doute avait-elle pris un détour
L'horloge indiquait 8 heures 47'
D'abord, je me félicitai d'avoir fait un aussi bon temps
Puis à la réflexion
Je me dis que c'était impossible
Il était près de 8 heures 45'
Quand ma voiture a rencontré ce gros camion
C'est même très précisément à 8 heures 47'
Que mon cœur
A cessé de battre

lundi 2 janvier 2012

La machine


La femme s’avance, circonspecte. Elle boirait bien quelque chose de chaud. Posée sur la table, la machine lui fait face. C’est un cube de métal et de plastic qui parait aussi engageant qu’un parcomètre. Mais c’est une machine à café. Noir, au lait, sucré, déca...  pour 1,20 euro, elle vous le sert selon le goût que vous avez sélectionné. Et elle fait même de l’eau chaude. Pour le thé.
Que faut-il mettre ? Le compte juste ? Une pièce de un euro et une de vingt centimes ? La dame s’interroge. Elle approche précautionneusement son regard de myope. C’est écrit en tout petit au dessus de l’écran digital : la machine accepte toutes les pièces, de 5 centimes à deux euros, et elle rend la monnaie. La dame pousse sur le bouton « café au lait sucré », pour voir. Rien ne se passe ; il faut d’abord payer. Elle hésite, flaire un piège. Elle regarde autour d’elle, mais il n’y a personne pour l’aider ; elle est seule face à cet engin qu’elle devine hostile. Elle se saisit néanmoins d’un gobelet en carton dans le distributeur et le place sous le bec verseur, c’est une action sans danger. Mais sans conséquence...
Elle se décide enfin : fouillant son sac à main, elle y trouve son porte-monnaie et en extrait scrupuleusement le compte exact en quatre pièces. Elle en pousse une première dans la fente. La machine avale la pièce de 10 centimes sans broncher. Seule une modification du texte sur l’écran où s’inscrit désormais « À payer : 1,10 euro » indique qu’elle semble fonctionner normalement. La dame insère alors une autre pièce, puis les deux dernières. À chaque fois, elle suit d’une oreille inquiète le parcours de la pièce qui disparait dans les entrailles métalliques et les réponses sur l’écran. Il indique maintenant : « Sélectionnez la boisson de votre choix ». La dame a un petit serrement au cœur, une ultime hésitation, mais appuie enfin sur le bouton « café au lait sucré ». Rien ne se passe. L’angoisse l’étreint déjà. Soudain, un bruit qui évoque à la fois le cabinet dentaire et la calandreuse automatique la fait sursauter. Enfin, quelque chose coule dans le gobelet. En quelques secondes, il est rempli. La femme attend les dernières gouttes, après quoi, elle s’empare du récipient. C’est chaud et ça sent indubitablement le café. Elle se retourne en esquissant un sourire de satisfaction : une fois encore, l’Humain a triomphé de la machine.

Chanson pour janvier

J’aime le mois de janvier
Pourquoi n’en parle-t-on jamais
Tous les compliments
Vont au Noël Blanc
À la chaleur de l’été
À la douceur de mai
Mais jamais
Au mois de janvier

J’aime le mois de janvier
Pour son soleil ressuscité
Pour la lumière retrouvée
Degré par degré, petit à petit
Comme un enfant qui se construit
L’année débute en beauté
Quand sonne le mois de janvier

J’aime le mois de janvier
C’est pas que je n’aime pas octobre
Et ses splendeurs mordorées
Mais ne me jetez pas l’opprobre
Ces quelques minutes grappillées
Chaque jour un peu plus sur la nuit
Me sortent de ma léthargie
J’aime le mois de janvier

J’aime le mois de janvier
À chaque année renouvelée
La promesse d’un futur meilleur
Comble ma nature de rêveur
Je n’attends rien de ce premier mois
D’autre qu’un léger émoi
Et moi j’aime le mois de janvier
J’aime le mois de janvier