mardi 6 septembre 2022

Quelques traits blancs sur fond noir

Je n'ai aucun souvenir du quel fut le premier ; je dirais que c'était le piano ou la contrebasse, mais allez savoir ! Quant à la période où ils furent réalisés, pareil : entre 2004 et 2010 ? Un par an... Belle moyenne.
Initialement, il s'agissait de deux ou trois petits dessins en A5, voire en A6. Incapable d'être précis, j'essayais d'être économe, sobre. A posteriori, je pencherais pour une influence du dessinateur Royer qui précéda Pierre Kroll et Philippe Geluck comme illustrateur au Soir.

Une fois faits, je remisais mes "croquis" dans un carton. Je me rendais bien compte qu'ils s'organisaient autour d'une thématique musicale, et même carrément jazzy, mais c'est venu par hasard. Une réminiscence de mon temps de régisseur au Travers, je suppose, lequel était pourtant à l'époque loin derrière moi. J'ai toujours fonctionné avec un temps de retard. C'est pour ça que je ne fais de musique qu'avec moi tout seul.

De loin en loin, je les ressortais, j'en faisais des photocopies, des agrandissements, je les retournais, je les décalquais, je précisais le trait. Et puis je les rangeais dans une nouvelle chemise que j'enfermais dans un fond de tiroir comme pour sanctifier le travail accompli. De tiroirs en tiroirs, je ne les ai jamais jetés. Aucune clairvoyance méritoire, aucune signification, sinon peut-être psychanalytique : je ne jette jamais rien. 

Le noir sur blanc ne me convenant pas, je n'ai pas trouvé d'autre technique que poser mon dessin sur un carton noir léger et repasser au crayon sur le trait en poussant comme un malade pour faire apparaitre le dessin en creux sur la feuille noire. Ensuite, je remplis le sillon au marqueur blanc. C'est un peu fastidieux et en y réfléchissant, ça me semble indigne de notre XXIème siècle technologique. 

J'en avais déjà fait deux ou trois, comme ça, et qui trainaient dans des cartons  -j'ai beaucoup de cartons-, mais jamais toute la série. Pour l'expo -grâce soit rendue à Brigitte qui me confie son bateau-, je me suis décidé à terminer les dessins qui n'étaient pas fini, à tous les mettre au même format A4, sur la même qualité de papier, et puis voilà. 

Quand j'y pense, de 2004 à aujourd'hui, ça fait 18 ans. 18 ans pour quelques traits blancs sur fond noir, quelle productivité ! Ça aussi, ça me semble indigne du siècle. 

Je crois que ça ne me déplait pas, d'être indigne du siècle.




jeudi 30 décembre 2021

Sweet Rosalie (suite)

Il s’était écoulé 15 ans. On ne peut pas dire que François avait travaillé durant tout ce temps. Tout au plus avait-il répété quelques gestes techniques. Parfois même, il les rêvait. Il avait observé la lumière et les couleurs qui changeaient au cours des saisons. Sans doute faisait-il le plein d’impressions. Mais tout cela était inconscient. Car il n’avait pas de projets. Le temps était devenu immobile, et ne recommença à vibrer qu’au bout de ces quinze ans. 


Oh, bien timidement, d’abord. On avait recasé François dans un petit logement, il bénéficiait d’une maigre pension. C’était sans importance, il avait appris la frugalité. Ainsi, il parvint à économiser jusqu’à pouvoir entrer dans le magasin spécialisé et y faire l’achat du matériel indispensable. Rentré chez lui, il n’avait rien eu de plus pressé que s’aménager un atelier qui lui prit la moitié de sa chambre. Qu’importe ! Il installa la toile sur le chevalet, prépara ses couleurs, ses pinceaux, un fusain et… il resta bloqué. Devant lui, trônaient sur une tablette 4 livres déposés dans un désordre savamment orchestré. Une bouteille et un verre complétaient le tableau. Il avait modelé le tout grâce à deux petits spots. Mais il fut incapable d’esquisser le moindre trait. Il restait médusé, fixant alternativement son installation et la toile vierge, jusqu’à enfin leur tourner le dos.


Il erra deux jours dans son petit 35 m carrés, dormant dans un fauteuil pour éviter le spectacle désolant de sa chambre. Avait-il tout perdu ? Ou bien… Ou bien Rosalie avait-elle eu raison ? Après tout, ne valait-il pas mieux que ses sempiternels paysages, pots de fleurs ou corbeilles de fruits ? Ces natures mortes ?


L’homme gardait de l’exécution du portrait de sa défunte femme un souvenir imprécis, comme s’il avait voulu l’oublier, mais petit à petit, remontait à sa mémoire la fièvre qui l’avait saisi durant ce travail et la satisfaction qu’il avait éprouvée en écrivant « François » en bas à droite de l’œuvre.

« Oui, pensa-t-il, bien sûr, il me faut un modèle ! »


Si peu dispendieux qu’il fût, il savait qu’il ne pouvait se payer les séances de pose. Aussi se résolut-il à travailler d’après photos. Il fit donc l’acquisition d’un appareil Polaroïd et se mit en quête d’un modèle qui serait à la hauteur de Rosalie.

C’était le premier dimanche de mai et il rentrait chez lui, dans sa poche la photo d’une dame complaisante à qui il avait fait prendre la même pose que Rosalie avait naturellement adoptée pour son unique portrait. 


Désormais libéré des contraintes du temps, François travaillait sans relâche, un œil rivé sur la photo, l’autre sur le corps qui prenait forme sur la toile. Il ne lui fallut que quelques jours pour arriver au but et le résultat fit naître en lui une émotion qu’il n’avait plus connue depuis 15 ans. Mais aussitôt, il eut le désir de recommencer. Il changea de quartier et trouva une autre dame qu’il convainquit sans problème d’adopter la pose. Il cherchait toujours des femmes qui ressemblassent à Rosalie, au moins par l’âge et l’apparence.


Il y en eut d’autres. Et toutes ces femmes identiquement installées exaltèrent chez lui un sentiment de nouveauté : tous ces modèles dans une même position, mais dans un décor différent. C’était… « conceptuel », comme il l’avait lu dans « Reflets de l’Art Moderne. Un peu comme les Marilyn de Warhol. Il volait, il planait, au rythme d’un portrait par semaine. Il prenait plaisir à travailler les couleurs au couteau, surtout les rouges qui le mettaient comme en transes. À chaque fois, c’était le même scénario qui se répétait : une sorte de transe, l’émotion du travail accompli, un léger moment de flottement, puis le besoin de se remettre à l’ouvrage.


François s’efforçait toujours à ce que les séances de pose fussent dénuées de témoin; elles requéraient à ses yeux un minimum d’intimité entre lui et le modèle. Hélas, un hurlement horrifié ponctua la septième séance ; une jeune femme venait de tourner le coin et assista à la scène. Et ce fut tout un quartier endimanché qui sortit dans la rue pour voir cette dame égorgée devant cet homme, un appareil photo dans une main et dans l’autre, un couteau de peintre dégoulinant de sang. François resta là, au milieu de la foule. Les policiers arrivés quelques instants plus tard l’embarquèrent sans qu’il opposât la moindre résistance.


Le policier chargé d’enquête ne fut pas long à retrouver le dossier de François, incarcéré 15 ans plus tôt pour avoir assassiné sa femme « dans un mouvement de colère » avait plaidé l’avocat. Il en avait aussitôt après exécuté le portrait qu’il avait intitulé « Rosalie en nature morte » et dont la presse avait fait ses choux gras.

samedi 9 janvier 2021

Rétrospective impériale

 


Une galerie de photos un peu désordonnée et "vite fait-mal fait", mais à moins d'une inspiration profonde, d'un désir subit ou d'une occasion, je ne reviendrai pas dans un proche avenir à ce genre de créations. J'ai seulement voulu permettre aux absents et aux nostalgiques de se (re)plonger dans ce qui fut à mes yeux un très bel été.














 







Merci de la visite. La prochaine exposition est en route 😊

jeudi 30 juillet 2020

Et sur l'Impériaaaaale...

Exposition temporaire de mon bestiaire sur la péniche (L'Impériale) de mon amie Brigitte.
A voir à Oisquercq, près de la place communale, tous les week-end d'août à partir du mercredi 5 (vernissage).

Pas de mots,
Le choix des photos.














mercredi 15 janvier 2020

Le temps des migrations

Projet

Esquisse (les jambes ne sont pas encore attachées)
Oiseau sans tête (1) à la maison, perdu entre Danseureuses et Trapézistes

Oiseau avec tête déménagé à l'Aca, dans la cave






                                                               












Il était nu. Ici, habillé avec des cartes au 1/25000





Pourquoi pas lui faire une famille ?





Il faut réfléchir au socle du premier

   


Et continuer à travailler sur les autres



Oiseau sans tête (2)


Les magnifier un peu


On sort de la cave ! Ces petites bêtes ont besoin de lumière et d'espace



















Finalement, le socle, ce sera ça :
Des tiges de 8 mm, cintrées, soudées pour donner cette impression de vague qui insuffle l'élan au zoizoo.












Et je suis vachement fier de mon idée et de l'avoir réalisée presque tout seul 😊. Je n'arrivais pas à souder convenablement les tiges au sommet ; c'est Chloé (la prof) qui s'en est chargé.




Donc, début mars, j'avais quasiment fini cette série. Au point que Chloé s'inquiétait de ce que j'allais faire jusqu'à la fin de l'année. J'avais bien des projets pour la suite, mais j'avais surtout en tête une exposition "personnelle" à Spa, qui durerait de la fin des vacances de Pâques à l'expo de fin d'année. Elle devait reprendre les Danseureuses, les Trapézistes, Amor de mis amores, et le Temps des migrations (les Zoizoos), plus quelques autres bricolages. J'étais tout fiérot.

Et puis, patatras ! 13 mars : épidémie, coronavirus, pandémie, Covid-19,  fermeture des écoles et des académies... Boum. Encore un peu inconscient de ce qui nous tombe dessus, imaginant que cette histoire serait finie bientôt, je ramène vite fait tout mon bestiaire à la maison, où je confonds le coronavirus avec la grippe aviaire :

Ça commençait à devenir un peu encombré chez moi, 
mais je pouvais travailler. 
L'essentiel était fait; 
il me restait juste quelques petits trucs à fignoler.

Et puis, ça a été le confinement. 
Et l'exposition à Spa est vite -mais provisoirement- tombée à l'eau (de Spa évidemment). J'ai continué de rêver quelques temps à la possibilité à l'expo de fin d'année, mais pas longtemps. Finalement, comme beaucoup d'académies, la nôtre a fait le choix d'une exposition virtuelle. C'est mieux que rien. 

J'ai donc envoyé à Isabelle (la directrice) quelques photos prises durant l'année (voir plus haut). Et puis m'est venue l'envie de mettre en scène mes Zoizoos, de les montrer en action dans l'espace; pas dans la cave ou dans l'escalier de l'académie, mais en liberté, comme doit l'être tout Zoizoo. 
Et voilà :

                                     

 
    
Merci à Isabelle VH qui a pris la première photo de ces Zoizoos en liberté; 
Merci à mes voisins du dessus qui ont bien voulu installer à leur balcon le système d'accrochage.

Bon, ben, comme on a dit...

Rendez-vous début juin sur le blog de l'Académie pour y apprécier les travaux de tous mes petits camarades. Dès que j'aurai l'adresse et les dates, je vous les communiquerai.*

Ciao

* Et bien voilà, c'est ici : https://beauxarts1210.tumblr.com Bonne visite !